La simplification du droit fait entrer le télétravail dans le code du travail.
Le télétravail va entrer dans le code du travail, en vertu d'un amendement adopté mercredi 12 octobre 2011 par les députés lors de l'examen de la proposition de loi UMP sur la simplification du droit. Cet amendement, signé du député Philippe Gosselin (UMP), a été adopté fin septembre par la commission des Lois de l'Assemblée dans le cadre de la proposition de loi de simplification du droit de Jean-Luc Warsmann (UMP). Un amendement du gouvernement a également été adopté pour bien préciser que le télétravail dans la Fonction publique faisait quant à lui l'objet d'une négociation "qui doit s'ouvrir avant la fin de la législature". Le télétravail ou travail à distance va ainsi bénéficier d’une véritable assise juridique en France avec son introduction dans le Code du Travail.
L’ANDT – Association Nationale pour le Développement du Télétravail et de la Téléformation ne cache pas sa satisfaction et son président Gérard VALLET a déclaré qu’il attendait cette mesure depuis 17 ans puisque l’ANDT avait été fondée dans cet objectif.
Pourtant, il ne cache pas non plus sa déception à la lecture du rapport du 6 octobre 2011 rédigé par la CCIP et intitulé « Dynamiser le télétravail : un enjeu décisif pour la croissance et l’emploi ».
En effet, ce rapport pourtant parfaitement construit et documenté analyse le monde du télétravail salarié (côté employeurs) et présente 5 propositions dont 2 semblent bien tardives. Ce rapport commence par retracer l’ensemble de la démarche juridique dont la fameuse proposition de loi de juin 2009, « perdue » au Sénat y compris après la tentative de « recherche » de juin 2010. Tout le monde connaît cette histoire. Pourtant ce rapport fait état d’une « surprise » … … cependant, et à la surprise générale, un amendement à la proposition de loi relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives, reprend des dispositions identiques. Pour autant, le lien avec l’objet de la proposition de loi est discutable tant il est éloigné d’un quelconque objectif de simplification du droit. Surtout, au regard de son potentiel et de ses implications économiques et sociales, le télétravail mérite plus qu’un simple amendement.
Comment vraiment croire à l’effet de surprise quand ce texte est signé par la CCIP ?
Mais voyons ces deux propositions :
PROPOSITION N°1
Définir plus précisément le télétravail en excluant expressément le travail nomade irrégulier, non substantiel, ou qui n’est pas expressément demandé ou accepté par l’employeur.
Comment peut-on croire que ce rapport daté du 6 octobre 2011 soit 6 jours avant la séance à l’Assemblée puisse être autre chose qu’une critique en règle de cet amendement.
PROPOSITION N°3
Exclure les télétravailleurs à domicile du bénéfice de la présomption d’imputabilité de l’accident au travail.
Ici encore cette proposition est surprenante. Par sa révélation plus que tardive, mais surtout dans la mesure où le rapport précise avec beaucoup d’honnêteté ce qui suit :
58 Selon le CAS (« Le développement du télétravail dans la société numérique de demain », préc., spéc. p. 111s.) , la Belgique est le seul pays à avoir instauré en mai 2009 explicitement la présomption d’imputabilité de l’accident au travail pour le cas spécifique des télétravailleurs. Son exemple semble avoir démontré que la population des télétravailleurs était peu sensible aux accidents du travail et que l’établissement d’une telle présomption n’avait pas induit une augmentation notable des accidents du travail ; ce qui incite de fait les salariés à accepter le télétravail. Qui plus est, les accidents de trajet diminuent fortement. Les cotisations patronales « accident du travail » n’ont donc pas augmentées. Selon l’ANACT, la population des télétravailleurs est très peu sujette aux accidents. Selon le CAS, le taux d’accidents du travail ne semble pas avoir augmenté et le nombre d’accidents de trajet a fortement diminué. Ceci étant, la Belgique est le seul pays à avoir mis en place le bénéfice de la présomption d’imputabilité de l’accident au travail en cas de télétravail, seulement depuis 2008, ce qui ne nous donne pas le recul nécessaire pour apprécier de l’innocuité de ce système.
L’ANDT demande alors si les 3 à 4 années d’expérimentation ne suffisent pas, combien de temps (et surtout avec combien de télétravailleurs) devrons-nous encore attendre pour comprendre que dans la plupart des cas un arrêt de travail est délivré davantage pour l’impossibilité de se rendre au travail que pour l’impossibilité de travailler. Dès l’instant ou le télétravailleur n’a pas ou plus à devoir se déplacer pour « ALLER » travailler, le nombre des arrêts doit effectivement considérablement diminuer, ceci allant bien dans l’objectif de la réduction des dépenses de la sécurité sociale. Cet aspect a d’ailleurs fait l’objet d’échanges musclés en séance.
Mais l’analyse de l’ANDT va beaucoup plus loin. Comme l’association ne cesse de le répéter, le télétravail salarié au domicile n’est pas une bonne chose. Plutôt que de critiquer et de chercher à avancer sans risque (alors que depuis que l’Homme avec un grand H s’est redressé pour marcher sur ses deux jambes, il a pris le risque de tomber), mieux vaudrait s’attaquer au vrai problème de la mise en place d’un réseau dense de télécentres et tiers lieux, parfaitement maillé et implanté partout en France. Un tel réseau mettrait fin à tous ces débats qui font qu’à chaque fois que le télétravail peut avancer de façon significative, il faut systématiquement lui opposer un nouvel obstacle ou ralentisseur.